So no one told you life was gonna be this way... *clap clap clap*

La vie est tranquille en ce moment, mais je ne m’en plains pas. Disons que j’ai été suffisamment habituée au drama pour savoir apprécier les choses quand elles sont faciles, presque routinières. Je ne m’ennuie pas au travail, alors j’imagine que ça aide aussi. Je me suis aussi rendu compte que c’était vraiment ce que je voulais faire, et même si ce n’est pas rose tous les jours, je me nourris toujours de la satisfaction d’avoir bouclé un dossier. Il y a quelque chose de réconfortant à se dépêtrer d’une situation difficile, même si on ne semble pas voir le bout du tunnel quand on a du travail jusque par-dessus la tête. Ce qui me trotte dans l’esprit, bien sûr, c’est tout de même ma relation avec Sól – c’est d’ailleurs une constante depuis qu’on s’est retrouvées à Bergen.

Elle n’a cessé d’évoluer, en bien comme en mal, et aujourd’hui, je ne saurais dire précisément où on en est. C’est difficile pour moi de tourner la page sur ces mois d’incompréhension et la violence avec laquelle j’ai vécu toute cette situation. Ça a fait remonter pas mal de fantômes et ça nous a blessées toutes les deux. Je ne peux pas m’empêcher de mettre cette distance entre nous, et pourtant, c’est comme si je savais que quoi qu’on fasse, on aurait pourtant toujours ce lien invisible entre nous. Étrange. Quoi qu’il en soit, j’avais ma soirée de libre ce soir, et j’avais bien envie de rendre une visite surprise à Aleksander. Ça fait un petit moment qu’on ne s’est plus vus, et même si tout le groupe se parle évidemment quotidiennement par téléphones interposés, évidemment, ce n’est pas la même chose quand on se voit en vrai.

Je redoute ça, parfois : qu’on finisse tous par se perdre dans nos vies d’adulte et commencer à s’éloigner, sans le vouloir. Du coup, une visite à l’improviste, ça me paraît être la meilleure option possible pour éviter ce coup de cafard, même si bien sûr, il a toujours le risque qu’il ne soit pas chez lui. En sortant du travail, je me suis donc mise en route pour acheter tout un cas de cochonneries à manger – et puis je me suis calmée, en me disant qu’on pourrait sans doute se faire commander quelque chose en cas de grosse faim. Je me suis alors contentée de quelques snacks, et c’est comme une enfant que je me suis mis en route pour le domicile de mon ami. L’attente derrière la porte me paraît un peu plus longue que d’habitude, et finalement, un grand sourire prend place sur mes lèvres quand elle s’ouvre.  « – Surprise ! »

So no one told you life was gonna be this way... *clap clap clap*

Je suis accueillie par une vague de joie et de bienveillance, et ça suffit pour faire naître un large sourire pour mes lèvres. Pas que j’en doutais, mais ça fait toujours plaisir après une longue semaine de travail. Et plus encore parce que je n’ai pas vu Aleksander depuis un moment maintenant. Je me serais sentie bête s’il n’était pas chez lui, mais j’ai été chanceuse sur ce coup-là.

« – Je vais très bien, et toi ? » Je le serre contre moi pour le saluer, et je le laisse ensuite fermer la porte derrière moi avant de lui sourire. J’ai quand même une pensée pour les autres, comme si je culpabilisais de ne pas vraiment avoir cherché à réunir tout le monde, mais je sais aussi qu’on a chacun nos obligations maintenant. Nos grandes réunions sont plus rares, ce qui est normal, mais on fait toujours un effort pour qu’elles existent encore – et puis, de toute façon, on pourrait toujours envoyer un selfie sur notre conversation de groupe.

Ça sera toujours un signe pour montrer aux autres qu’on a pensé à eux dans tous les cas, et pourquoi pas les encourager à faire plus souvent ce type de soirée. Je lâche un petit rire quand il me fait part de son occupation avant que je n’arrive, et je hausse les épaules avec un sourire amusé. « – J’ai pas attendu très longtemps, t’en fais pas. J’espère que je ne débarque pas à un moment trop important alors ! » Je vais me poser dans un coin du salon pour retirer mes chaussures, par politesse, et je reviens près de l’entrée pour les déposer à côté de la porte.

« – Pas grand-chose à part le travail à vrai dire, mais je suis contente que tout se passe bien. Et toi, alors ? Ça fait longtemps, tu as peut-être des choses intéressantes à me raconter. » L’avantage de n’être que deux aussi, c’est que j’ai moins tendance à m’effacer aussi facilement que lorsque tout le groupe est réuni.

Je suis aussi contente de m’entendre parce que j’ai pris en confiance depuis mon arrivée dans cette ville. Même s’il m’arrive encore de temps en temps de remettre en cause mes paroles ou l’intérêt qu’on peut avoir pour moi, je suis consciente que j’ai fait des efforts pour sortir de ma timidité et qu’ils commencent (bien heureusement) à porter leurs fruits. « – J’ai déjà pris tout ce qu’il nous faut, normalement ! » Je l’informe en lui montrant le sac que je tenais, et je ne perds pas de temps pour me diriger vers la table pour en sortir tout le contenu. «  - Normalement, j’ai pris tout ce qu’on aime ! »

So no one told you life was gonna be this way... *clap clap clap*

Ça va être une bonne soirée, et je suis contente d’avoir eu l’idée de lui rendre une visite surprise, étant donné qu’on n’avait rien de vraiment prévu tous les deux – parler un peu et manger des cochonneries en regardant une fiction, ça me semble être un planning plutôt pas mal pour une soirée entre meilleurs amis. Je l’écoute me raconter ce qui se passe dans son BL, et je fais une petite moue en hochant la tête, consciente que malheureusement, cette ouverture d’esprit que j’ai toujours connue en Norvège est loin d’exister partout ailleurs dans le monde. « - On sait jamais, les choses vont peut-être finir par évoluer », j’estime avec un petit sourire. Après tout, les séries occidentales ne mettaient pas en avant des couples gays il y a encore quelques années, et pourtant, il y a de plus en plus de représentations aujourd’hui, ce qui est évidemment une très bonne chose.

« - Je suis vraiment contente que tout se passe bien avec lui ! Il a intérêt d’ailleurs, il va avoir toute la bande aux trousses sinon. » Je lui lance un sourire espiègle, plus pour le taquiner qu’autre chose, mais c’est vrai que dès que l’un de nous rencontre un problème, ou une déception amoureuse ou amicale, alors notre groupe se rassemble autour de cette personne comme un seul homme. Je crois encore qu’on a toujours cette qualité. Je secoue la tête quand il me demande si j’ai rencontré quelqu’un. « - C’est le calme plat depuis un bon moment, maintenant. En fait je me demande même comment on arrive à rencontrer des gens après les études ? J’ai l’impression de passer mon temps à travailler et quand je rentre chez moi, je suis crevée. Et mes jours de repos, ça me sert à faire des courses ou le ménage. J’ai la vie d’une ménagère. » Je pouffe un peu à ce constat, ne me prenant pas vraiment au sérieux.

Chercher l’amour n’est pas une priorité de toute façon, et puis tous les soirs, Gaumont m’attend sagement à la maison, alors je n’habite pas vraiment toute seule. Une fois que je lui ai montré toutes mes trouvailles, je rigole un peu à ses paroles alors que j’attrape un bol de nouilles instantanées. « - Évidemment que j’y ai pensé ! On se prépare tout ça et on va s’installer ? »

So no one told you life was gonna be this way... *clap clap clap*

C’est probablement mon naturel optimiste et bisounours qui parle (et sans doute bien trop naïf), mais je me dis que si la société a évolué du bon côté quelque part, alors elle peut aussi le faire ailleurs, même si ça prend plus de temps. Et pourtant, il me rappelle une nouvelle fois ce qu’il m’a déjà dit au sujet de ce pays que je ne connais pas beaucoup, si ce n’est à travers ses témoignages et ce qu’il a pu apprendre de son côté. « - C’est quand même bête. On dit partout que c’est hyper important la représentation pour faire bouger les choses, c’est dommage que ça ne puisse pas être le cas pour la Corée. » Si c’est une histoire de mentalité, est-ce que ça pourrait évoluer avec les nouvelles générations ? Là encore, je crois que je me mets le doigt dans l’œil. J’ai bien l’impression que l’opinion la plus progressiste est minime ou du moins, qu’elle ne tient pas à se faire remarquer pour le moment.

« - C’est cool si t’as ton Happy Ending en tout cas, tu seras le premier du groupe ! Et n’oublie pas cette discussion si un jour tu dois vraiment trouver des demoiselles d’honneur, évidemment. » J’esquisse un petit sourire en coin, consciente qu’il y a de fortes chances pour que j’en sois, tout comme la Daphné de notre groupe. Et nous connaissant, on est bien capables de faire quelque chose d’original pour célébrer ce jour là à notre sauce, s’il finit par exister. La discussion prend une tournure un peu plus tristoune, et tandis que je sors toutes mes courses, je fais la moue en secouant la tête. « - J’ai pas beaucoup plus de chance, j’ai l’impression qu’on est tous beaucoup occupés en ce moment. Mais on pourrait peut-être s’organiser quelque chose pour cet été ? Ou alors, on profite de ce soir pour trouver le parfait prétexte pour réunir tout le monde. »

Un petit mensonge gentillet, je ne vois pas en quoi ça les fâcherait. Et puis au contraire, peut-être que tout le monde se rendrait compte qu’on n’a pas besoin de partir dans de tels extrêmes pour pouvoir se réunir comme avant. Certes, chacun a ses soucis d’adultes, mais les partager ensemble, ça les rendrait moins effrayants. « - Oh bah je ne cherche rien du tout alors c’est sûr, ça ne peut que me tomber dessus quand je ne m’y attends pas ! » Je hausse les épaules avec un petit sourire, puis je m’affaire avec lui pour préparer tout ce qu’il nous faut, avant d’attendre patiemment que mes nouilles chauffent. « - Je compte sur toi pour me raconter ce qui s’est passé dans ton épisode alors ! »

So no one told you life was gonna be this way... *clap clap clap*

C’est en ayant ce genre de conversation que je me répète que j’ai eu de la chance de naître et de grandir en Norvège. Certes, il y a aussi quelques inconvénients et on ne vit pas non plus au pays des Bisounours, mais on est quand même progressistes et il y a une bienveillance naturelle qui manque malheureusement dans bien des pays. « - Alors je vois plus qu’une option possible. On te coache et on te présente comme candidat aux prochaines élections présidentielles… Ça sera pas gagné d’avance, mais on pourra toujours préparer ta campagne en ligne ! Même si évidemment, il y a de fortes chances pour que finalement personne ne puisse la voir. »

Ma tentative de blague est devenue tristement réaliste, mais au moins, ça m’a permis d’alléger un peu la chose. Et en parlant de jours plus joyeux, je me surprends à imaginer le probable futur mariage de mon meilleur ami. C’est toujours sur un ton léger, et pourtant je souris largement quand il me dit texto qu’il m’envisage plutôt comme une témoin. Je me rapproche alors de lui pour déposer un baiser sur sa joue en guise de remerciement, et j’ébouriffe gentiment ses cheveux. « - Avec plaisir ! J’ai presque hâte que ça arrive du coup, sans pression évidemment. » Amusée, je me dis que le mariage serait sans doute une bonne occasion de rassembler toute la bande, mais bien sûr, il faudrait aussi que chacun fasse des efforts de son côté sans arriver à de tels extrêmes. Je sais que personne ne s’est disputé et qu’on s’aime tous autant, mais c’est dommage de se laisser avaler par la vie comme ça. « - On devrait sûrement leur envoyer un selfie dans notre discussion de groupe tout à l’heure ! C’est obligé que ça les fasse réagir », et ça pourrait même leur donner des idées.

J’affiche un petit sourire quand il me parle d’amour, parce que la manière dont ses yeux s’illumine est vraiment mignonne. Je suis heureuse qu’il est pu trouver quelqu’un de doux et de gentil pour partager sa vie. J’aimerais bien que ça m’arrive évidemment, mais ce n’est pas une priorité. J’ai l’impression que j’ai pas mal évolué depuis ces dernières années et que je n’ai pas réellement fini (d’ailleurs, est-ce qu’on termine de grandir un jour ?), et je préfère me concentrer sur ça pour le moment. Une fois que nos pâtes semblent chaudes, je me tourne vers lui et je hoche la tête, attrapant sa main libre dans la mienne. « - Oui, j’ai envie de voir de quoi ça parle ! Tu peux me raconter rapidement le contexte ? Comme ça, pas besoin de tout recommencer à zéro pour toi ! » Tout en parlant, je le guide vers le lieu où il se traînait, prête à me poser et à profiter de ma soirée avec lui.

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Je suis du genre à encourager mes amis dans ce qu’ils veulent faire – y compris dans des ambitions politiques, même si ça me paraît être à des années lumières de notre univers et de ce qu’on sait faire. Après tout, la maire d’ici s’est lancée très jeune dans cette drôle d’arène et même si elle a dû essayer bien des critiques et autres clichés (misogynes), elle a l’air de tenir bien sa barque puisque Bergen s’épanouit d’année en année, et on peut clairement sentir la différence maintenant que le nouveau quartier a été bâti. Le centre-ville commençait quand même à se laisser mourir comme dans pas mal d’autres villes qui ne sont pas habitées par des millions de personnes, alors c’est un plus indéniable. Et puis, les gens ont surtout des clichés en tête quand on leur parle de la Norvège, alors ça a sans doute aidé à nous faire connaître davantage aux yeux du monde, nous et notre culture.

« - Je pourrais toujours t’appeler en Facetime… Bon, y’a le décalage horaire, c’est vrai. Ou alors, on te trouve un suppléant, comme ça tu partages ton temps entre la Corée et moi. » J’esquisse un sourire amusé, parce que cette situation ubuesque a très très peu de chances de se passer, où que ce soit dans le monde. Ce serait même un peu bizarre, même si ça rajouterait quand même une dimension humaine à la politique. Mon regard s’adoucit encore lorsque, passée la blague, il s’attarde sur un possible mariage dans le futur, et j’incline ma tête sur le côté. « - En tout cas t’as l’air de te sentir vraiment bien avec lui, j’espère que ça va durer encore longtemps. »

À part moi, tout notre groupe d’amis s’en réjouit, et s’ils étaient là, ils n’auraient pas manqué l’occasion de le lui répéter à leur tour. Malheureusement, ce n’est que nous deux pour ce soir et ça me donne envie de leur envoyer une photo – histoire de leur faire comprendre de façon subtile que ça serait bien qu’on se revoie tous un de ces jours, d’autant que l’été est encore loin d’être terminé. Certes, on reste en Norvège et les températures sont moins clémentes que les pays plus au sud, mais on y est habitués depuis notre enfance et elles restent gérables. Je le vois sortir son téléphone, mais je le prends sûrement de court pour le moment puisqu’il me répond plutôt à propos du synopsis du BL, que j’écoute alors attentivement.

« - Ça a l’air intéressant ! Surtout si c’est une relation qui évolue et qui n’est pas prédictible tout de suite. Enfin je veux dire, il y a sûrement leurs deux visages sur le cover alors on se doute sans doute de ce qui va se tramer, mais au moins, y’a pas le premier bisou dès le deuxième épisode quoi. » Je souris et je récupère mes nouilles qui sont maintenant bien chaudes.

Je hoche la tête à son commentaire sur les acteurs qui prennent peu à peu la parole. « - C’est cool s’ils se sentent assez soutenus pour prendre la parole. Ils peuvent compter les unes sur les autres, mais j’imagine que c’est pas facile. » Une fois qu’on est bien installés tous les deux, je m’apprête à lui souhaiter un bon appétit, mais je repense aussi au moment manqué de tout à l’heure par rapport à la photo, alors je sors mon téléphone à mon tour pour déclencher l’appareil photo. « - Prêt ? »

So no one told you life was gonna be this way... *clap clap clap*

L’idée de voir Aleksander disparaître du jour au lendemain pour gouverner un pays est lunaire évidemment, et heureusement que ça ne reste que ça – une idée farfelue. Ni lui ni moi ne sommes franchement férus de pouvoir, et quant à ceux ou celles qui se voient bien avoir autant de responsabilités un jour… Eh bien bon courage, surtout dans le monde dans lequel on vit. « - Et tu me manquerais beaucoup trop ! Tout comme je sais que je te manquerais aussi, évidemment. » Le nez retroussé, je lui offre un petit sourire complice. « - D’ailleurs en parlant de danse, est-ce que tu as une idée de la prochaine date de ton spectacle ? J’aime beaucoup venir te voir. »

Et puis, comme on en parle, ça sera l’occasion pour tout le monde de se rassembler. Bien sûr, chacun fait des efforts, mais il arrive aussi que l’un de nous ne parvienne pas à honorer chaque rendez-vous, à cause du travail ou de nos engagements auprès de nos familles, par exemple. J’affiche un doux sourire lorsque j’entends la manière dont il parle de son amoureux, et ça ne dure que quelques secondes, mais je me surprends à espérer qu’on parle bientôt de moi de la sorte, aussi. Je ne cherche pas franchement l’amour, fervente croyante que ça nous tombe surtout dessus quand on ne s’y attend pas. Mais c’est vrai que ça ne serait pas désagréable d’avoir ces quelques moments de tendresse de temps en temps. C’est toujours agréable d’être accueillie par le petit Gaumont en rentrant, évidemment. Toutefois, la solitude est parfois un peu plus pesante en fonction des jours.

« - Je suis vraiment contente de te voir si heureux, tu le mérites mon chat. » Je le questionne à nouveau sur le BL, parce qu’il a l’air vraiment passionné par l’intrigue, et puis ça me fait plaisir de le voir parler de quelque chose avec autant d’entrain. « - Tu m’as convaincue pour regarder le reste ! Et puis si j’ai des questions, je t’embêterai un peu quand même.   » Je lui tire la langue avec un air complice. D’ailleurs, nos premiers plats commencent à être prêts, mais avant, on a tous les deux l’idée de prendre une photo pour l’envoyer aux autres. Je sors avec mon téléphone, et j’ouvre mon appareil avant de prendre plusieurs selfies de nous deux.

« - Tu préfères quelle photo ? » Je demande à Aleksander en lui montrant les différents clichés, et une fois qu’on a fait notre choix, j’envoie ladite photo sur notre conversation de groupe. « - Je suis sûre qu’ils vont vite réagir ! » Je lui fais un clin d’œil, puis je file m’installer avec lui devant son drama, ma boîte de nouilles à la main. « - C’est parti ! »

So no one told you life was gonna be this way... *clap clap clap*

Certains pensent qu'il existe des univers parallèles dans lesquels nos doubles vivent une vie complètement opposée à la nôtre. C'est parfois drôle (ou triste) de penser à ce que l'on pourrait bien faire dans ces autres vies – dans le cas d'Aleksander, je comprends bien que la carrière de politique ne plairait pas à mon meilleur ami. Et même si la règle voudrait que notre personnalité soit aussi bien différente dans ces autres univers, il me semble que ça serait toujours la même chose pour lui. C'est difficile de l'imaginer comme un être plein de pouvoir et faisant passer ses privilèges avant ceux des autres. Ça pourrait aussi être un président avec la main sur le cœur… mais c'est encore plus difficile d'imaginer un chef d'État à la tête d'un pays de Bisounours. Même en Norvège où les mentalités sont plus évoluées sur certains points, rien n'est encore parfait, alors je ne suis pas idéaliste à ce point-là.

Alors, je me contente de hocher la tête avec un petit sourire et la discussion prend un tournant plus actuel, avec son école de danse. On parlait justement de retrouver notre petit groupe d'amis, et si Aleksander fait un spectacle, ça serait une bonne occasion pour organiser de joyeuses retrouvailles. « - Oh ! Je regarderai la vidéo alors. J'imagine que le public n'a pas le droit de venir voir vos prouesses de temps en temps ? Mais tu nous diras la date du prochain spectacle dans ce cas, on viendra sûrement te voir ! » En tout cas, le rendez-vous est pris. Je ne sais pas franchement ce que je ferai l'année prochaine, mais ça ne devrait pas être difficile dans tous les cas de me libérer une soirée.  

Aleksander est le premier de nous deux à avoir su trouver le bonheur pour de bon auprès de quelqu'un, et évidemment qu'on est tous heureux pour lui, même si ça reste toujours un mystère pour ma part. Il y a bien eu quelques flirts de mon côté, mais jamais rien de très concret. Pour autant, je ne désespère pas, et c'est vrai que ce n'est pas non plus ma priorité. « - Je sais bien qu'on dit toujours que ça arrive quand on s'y attend pas. Mais je cherche même pas, alors… Et puis honnêtement, tant que j'ai ma famille, des amis, un boulot et un chat, je crois que le reste c'est que du bonus. »

Après notre petite photo, je prends quand même le temps de lui montrer les différents clichés, parce que je veux aussi qu'il se sente à l'aise avec ce qui sera envoyé. Je fais une petite moue en entendant ses commentaires, parce que ça me fait de la peine qu'il se voie comme ça. Je ne suis pas un parfait modèle de confiance en soi, et je sais que c'est difficile de se détacher assez de soi-même pour se voir comme les autres nous perçoivent. « - D'accord, j'envoie la seconde alors. Mais je te trouve bien sur toutes ces photos moi ! » Je dépose un baiser sur sa joue pour le rassurer, et j'envoie notre selfie avant d'aller m'installer avec Aleksander pour regarder le fameux drama. En à peine quelques minutes, je suis complètement dedans, sentant à peine les vibrations de mon téléphone m'informant de nouvelles notifications.