Secret little rendezvous ☾ Bastien

Mon père m'avait présenté à la fille d'un de ses collègues, il avait trouvé bon d'insister sur le fait qu'elle serait une petite amie parfaite. Selon lui, il y avait beaucoup de points communs que nous avions, mais à part le fait qu'elle vive à Paris comme mes grands-parents, je ne voyais pas vraiment les centres d'intérêts que nous partagions. Certaines personnes disent bien que les contraires s'attirent et je pense que c'est un peu ce qu'il s'est passé entre nous. Avec le temps, j'ai appris à la voir différemment et j'ai espéré que cet attachement envers elle pouvait dire autre chose. Elle avait aussi été un échappatoire, c'est notamment grâce à elle que j'ai convaincu mon père de poursuivre ma scolarité à Paris. Et sans ça, je n'aurai jamais fait la connaissance de ce beau bouclé qui devint rapidement bien plus qu'un simple ami. Bastien. Rien que son prénom déclenchait en moi des milliers de brasiers qui me consumaient vivement et longuement. Son amitié avec ma petite amie était un frein à notre relation, j'en étais conscient, mais je ne pouvais pas retenir cette envie qui criait à ma raison de se taire et à mon esprit de prendre des risques. Si seulement Abby aurait été le seul obstacle à cette histoire, tout aurait été plus simple. En réalité c'était tout un tas de prétexte mit bout à bout qui avait bien faillit m'interdire de ressentir tout ce bonheur. Ma famille n'aurai jamais accepté un tel rapprochement, leur fils avec un autre homme c'était inimaginable. Et la citation "pour vivre heureux vivons cachés" ne m'avais jamais mieux collé à la peau qu'à Paris.
Ça faisait quelques semaines déjà que je jouais sur deux tableaux et j'avais la chance que Bastien soit aussi patient envers moi, imaginant certainement que j'aurai un jour le courage de quitter ma petite amie pour lui. Pour le moment, je n'en avait pas la force et je contraignais mon amant à mentir à l'une de ses amies, quitte à la trahir lentement. Comme je n'avais pas vraiment de logement à moi en ville -puisque je logeais chez ma famille-, je passais mon temps chez des amis et il m'arrivais de rester chez Bastien. Abby ne s'inquiétait pas de mon absence, ça avait toujours marché comme ça entre nous, elle était celle qui me courrais après pour avoir de l'attention ou de l'affection, tandis que j'en offrais à d'autres sans qu'on me le demande. Les signaux étaient tous là pour me montrer que ce couple n'était qu'une grosse blague, mais elle s'accrochait et elle était la seule raison pour laquelle mon père avait un semblant d'estime envers moi. Rompre, ce serai perdre le peu de respect qu'il me restait de ma famille et c'était hors de question. Pourtant, c'était plus fort que moi et j'avais besoin de voir Bastien, de sentir son parfum m'envelopper lorsqu'il était près de moi, de savourer le gout de ses lèvres contre les miennes, de me délecter de cette douce sensation que je ressentais à chaque fois que mes mains touchaient sa peau. Est-ce que je me sentais coupable ? Bien sur que oui puisque je m'enivrais d'un plaisir interdit, caché aux yeux du monde par pure égoïsme.
Mes cours s'étaient terminés plus tôt aujourd'hui et la première personne que j'avais envie de voir fut le beau bouclé. Au lieu de penser à aller voir ma petite amie qui ne demandait qu'à passer davantage de temps avec moi, je ne pensais qu'à lui. Grimpant les escaliers de ce vieil immeuble comme si je connaissais le chemin par coeur, j'arrivais rapidement à la chambre de bonne qu'occupais Bastien. Je tentais ma chance en appuyant sur la poignée pour ouvrir la porte, je fus à la fois inquiet et heureux que ce soit ouvert. Si je pouvais entrer aussi facilement, je n'étais certainement pas le seul, mais pour l'instant je ne comptais pas lui faire la morale, juste lui faire la surprise. Et puis, honnêtement, qui aurait l'idée de voler des choses dans une chambre de bonne ? Les appartements au dessous étaient bien plus intéressants pour ça. En m'avançant dans la petite pièce, je remarquais qu'il était assis devant sa fenêtre et occupé à lire quelque chose, peut-être des livres de cours. Je m'approchais en arrivant de derrière, glissant à son oreille ces quelques paroles en douceur :
« J'envie le cambrioleur qui tombera sur cette sublime vision de toi en train de lire paisiblement, l'esprit trop ailleurs pour se rendre compte que quelqu'un est entré. » il m'avait reconnu dès mes premiers mots, et j'affichais un large sourire, m'amusant de cette taquinerie. « J'avais presque envie d'enfiler une tenue sombre et une cagoule pour te faire peur, mais je me suis dis que ce serai risquer de me prendre un coup de bouquin dans la tronche donc l'idée m'est vite passé. » Mes lèvres s'égarèrent un instant au coin des siennes avant que je prenne place à ses cotés. « Comment vas-tu ? »

 

L'interdit avait toujours eu un meilleur gout, c'était une décharge d'adrénaline à chacun fois. Cette relation non autorisée était encore plus intense que ça, c'était enivrant, addictif, j'étais sans cesse obnubilé par l'envie de le retrouver. Et même si nous cacher était nécessaire pour bien des raisons, j'avais trouvé un moyen de mieux l'accepter en pensant injustement que nous côtoyer comme des amis dans la journée pouvait attiser le désir. Notre plaisir était certainement plus fort lorsque nous nous retrouvions comme amant la nuit, mais cette solution n'était qu'éphémère et en réalité, Bastien n'attendait que ma rupture avec Abby. C'était légitime, il assumait parfaitement sa sexualité contrairement à moi qui avait jusqu'à honte de le sous-entendre alors que j'avais l'impression de revivre pour de vrai dans ses bras.
« Rappelle moi de t'interdire d'adopter un gros chien alors. Il est hors de question de me faire croquer les fesses parce que je veux te faire une surprise. »
Même si un chien pouvait prévenir de l'intrusion de quelqu'un et, comme ce soir, lui faire réaliser qu'il avait oublié de verrouiller sa porte. Il avait surement été un peu tête en l'air ou quelque chose devait le préoccuper pour ne pas penser à un geste habituel et pour ne pas avoir vu le temps passer. Le soleil n'était pas couché donc ça pouvait lui laisser croire qu'il était encore tôt alors que les jours étaient plus long en cette période de l'année et que le crépuscule arrivait plus tard. Il arrêta de lire, déposa son livre sur le coté et vint tout de suite se blottir contre moi. Je le serrai doucement, appréciant ce contact à tel point que mon coeur aurait pu s'arracher de ma poitrine tellement il battait fort, c'était si exaltant comme sensation. Son parfum m'enivra immédiatement et mes paupières se fermèrent pour en profiter pleinement, inspirant comme si j'avais besoin de son odeur pour respirer. Mais ses paroles me ramenèrent rapidement à la réalité et j'ouvrais doucement les yeux pour regarder dans le vide.
« Je ne sais pas. » mon regard, teinté de tristesse et de gêne, trouva le visage de Bastien. « Je resterai tant que je n'ai aucunes scènes de ménage. » J'étais plus sérieux tout à coup, parce que je savais que c'était toujours une situation difficile. Tant qu'Abby ne me faisait pas de crises ou qu'elle n'appelait pas Bastien pour se plaindre, je me sentais plutôt libre, mais pour éviter de m'attirer ses foudres, j'essayais d'être présent pour elle lorsqu'elle en avait besoin.
« Ne m'en veux pas s'il te plait. C'est pas évident pour toi, mais ça ne l'est pas pour moi non plus tu sais. » Il était compréhensif, mais des fois j'avais l'impression que sa patience allait arriver à son terme. Je n'avais pas envie de jouer avec ses sentiments, ce que nous partagions était unique et si intense, mais c'était plus fort que moi et je n'arrivais pas à assumer cette relation. Il y avait tellement d'enjeux et de conséquences possibles, c'était terrifiant.
Je serrai un peu plus Bastien contre moi, à la fois pour le rassurer mais aussi pour me permettre de rompre l'étreinte sans le brusquer. Je me levais et m'éloignais pour faire quelques pas dans sa chambre, jetant un coup d'oeil par la fenêtre en cherchant désespérément à changer de sujet.
« Tu veux manger quelque chose ? » mon regard se tourna vers le sien. « Si tu veux, on peu aller manger à quelque part ensemble. » Ce n'était pas totalement un rendez-vous puisque nous n'allions pas paraître comme un couple, mais j'espérais que cette proposition puisse atténuer sa crainte par rapport à notre relation.

 

Imaginer Bastien avec un gros chien féroce était presque hilarant, ça contrastait beaucoup trop avec sa personnalité si douce. Alors lorsqu'il évoqua un Shiba, ça me paru nettement plus probable.
« Non ça va, ça devrait aller. Il sera surement aussi gentil que son maître et le seul soucis que je pourrais me faire, c'est s'il décide de grignoter mes chaussures pour en faire de l'art. » De l'art un peu destructeur mais de l'art quand même. Cette comparaison me fit doucement rire, avant d'aborder un sujet un peu plus délicat.

Je me levais pour me justifier sur la situation, au moins pour présenter des pseudos excuses, Bastien se leva à son tour pour venir me faire face. Ses lèvres contre les miennes eurent un effet calmant immédiat et je me mis à sourire à travers ce baiser comme l'idiot que j'étais. Lorsqu'il prit de la distance pour me prouver sa compréhension, je ne pu m'empêcher de ressentir un peu de peine. Il souffrait en silence et acceptait son sort sans broncher. J'avais tellement de chance de l'avoir, mais je ne m'en rendrais réellement compte qu'une fois que j'aurai perdu tout ça.
« Merci, et excuse moi. » S'il ne m'en voulait pas, des fois je le faisais volontiers à sa place. Il m'arrivait de me torturer de culpabilité parce que je continuais à jouer aux couples parfait avec Abby et qu'il attendait patiemment dans l'ombre que je libère de mes chaînes pour enfin le rejoindre. A l'heure actuelle, il était très peu probable, voir même presque impossible que j'arrive un jour à assumer quoique ce soit avec lui au grand jour et ça même si j'en mourrais d'envie au plus profond de mon être. C'était bête, je me sentais moi-même dans ses bras, comme une véritable renaissance, un second souffle, mais la réalité était complètement différente et j'étais terrorisé par le regard des autres et principalement celui de mon père. Alors lorsque Bastien était aussi compréhensif envers moi, ça me faisais du mal, parce que je continuais de le faire espérer par pure égoïsme.
Parler d'un repas ensemble détendit immédiatement la situation et je me permis même un rire en l'écoutant me parler de sushi. Mon sourire s'élargie et je m'approchais assez pour effleurer son nez du mien, mon regard dans le sien.
« Tout ce que tu voudras du temps que je suis avec toi. » une de mes mains glissa contre sa joue et je déposais un nouveau baiser contre ses lèvres, tenté d'engager quelque chose de plus intense mais retenu par cette promesse de sortir. « Sortons d'ici avant que je ne change d'avis. » Inconsciemment, je me pinçais la lèvre pour contenir une envie soudaine de me jeter sur lui. Il avait ce don de me rendre dingue d'un seul geste, d'une simple caresse ou d'une simple parole. Résister en public était une réelle torture mais je n'avais pas le choix.

Nous sortons enfin de la petite chambre de bonne où il vivait et je m'assurais qu'il verrouille bien la porte derrière lui avant de quitter l'immeuble. Une fois dans le couloir et d'autant plus dans la rue, une barrière invisible se dressa brusquement entre nous. Nous voilà redevenu les bons potes, c'était l'image que nous offrons en permanence à tous ceux qui nous entouraient. Après quelques rues et une recherche rapide sur une application de téléphone, nous arrivions à un restaurant asiatique spécialisé dans les sushi et plutôt bien noté. La décoration était très joli et moderne, c'était agréable et ça dénotait un peu avec les habituels déco traditionnelles. Nous avancions vers une table où une jeune femme nous installa.
« Si tu n'es jamais venu, j'espère sincèrement que ça va être bon parce que, je te préviens, il est hors de question que je tienne ta crinière le temps que tu rendre ton repas dans la cuvette. »
Ce restaurant n'était pas très loin de chez lui, il était possible qu'il ai déjà gouté leurs plats, comme il était tout aussi probable que non. Mon regard se posa ensuite sur leur carte. « C'est pas le choix qui manque. Qu'est ce que tu me conseillerai ? » je me penchais un peu pour donner un air de confidence à ce que je m'apprêtais à lui dire. « C'est la première fois que je viens dans un resto comme ça, je ne connais absolument pas. » une petite grimace déforma rapidement mon visage avant d'afficher un beau sourire et reporter mon attention sur la carte, lisant attentivement toutes les descriptions de chaque recette.

 

La situation était délicate, mais notre histoire avait toujours été ainsi. A notre rencontre, j'avais passé la nuit à ses cotés pour m'enfuir avant son réveil, ce n'était pas ce qu'on pouvait appeler quelqu'un qui assumait. Et s'il m'en avait voulu au début, il avait fini par comprendre la raison de ma peur et finalement nous entretenions une relation à l'abri de tous les regards. Si ce n'était que ça encore, ça aurai pu s'accepter plus facilement, mais Bastien devait supporter que je m'affiche publiquement avec quelqu'un d'autre. Sans parler qu'elle était une de ses amies et je me doutais que sa relation avec elle devait en pâtir. Ce soir, comme la plupart de mes visites chez mon amant, j'arrivais à détourner l'attention et proposer un moyen de ne plus penser à Abby. Partager un dîner avec lui me semblait une bonne idée à première vue même si nous allions paraître comme deux simples amis en public et ça tombait bien, Bastien avait envie de sushi. Avant de sortir, les paroles du bouclé me figèrent sur place et un sourire s'afficha lentement sur mes lèvres. J'étais friand de ce genre de sous-entendus, il le savait.
« Oh ne t'en fais pas pour ça, le dessert sera meilleur ici. » le regard défiant et le sourire en coin, je finis par sortir de cette chambre avant de céder pour de bon à cette tentation. Nous avancions ensemble dans la rue avec une barrière invisible qui nous séparait. Il n'y avait pas de gêne, mais c'était comme si nous jouions deux rôles : celui des amants dans le privé et celui des amis dans le public. J'arrivais donc avec mon ami dans un restaurant spécialisé dans les sushi et une fois à table, je réalisais que ce n'était pas un endroit très commun pour moi. Evidemment, sortir dans un restaurant n'était pas le problème, mais aller dans un qui servait principalement des sushi, ce n'était pas dans mes habitudes. Mais avant de demander des conseils, une mise en garde par rapport à ses cheveux et son estomac fragile me semblait une bonne idée. Heureusement pour moi, il était déjà venu et aimait leur plats, c'était bon signe pour passer un repas agréable. Il me proposa plusieurs solutions pour commencer, les california roll étaient les seuls nom que je connaissais alors ça me fit sourire. Je n'étais pas contre l'idée de tester différentes recettes.
« Un plateau ? Oui ce serai parfait pour gouter un peu de tout. »
Je remarquais le sourire et le regard qu'il eu lorsque je m'approchais et si ça me fit sourire en retour, ce ne fut vraiment pas longtemps. Réalisant que nous étions en public, il était hors de question que quelqu'un remarque ce genre de choses. Espérant que Bastien ne le prenne pas mal, je m'éloignais pour retrouver le dossier de ma chaise et reporter mon attention sur la carte. Il évoqua alors une boisson au litchi et une grimace de dégoût s'afficha rapidement sur mon visage.
« J'aurai adoré mais ne m'en veux pas, j'ai pris une cuite au soho la semaine dernière et je suis vacciné contre le litchi pour un petit moment. Il y a une boisson au thé, ce sera parfait. »
La liqueur de litchi m'avait retourné l'estomac la semaine précédente, retrouver ce goût dans ma bouche ce soir là aurai pu me rendre de nouveau malade et je voulais vraiment profiter de la présence du bouclé. Et puis une boisson au thé me rappellerai mes racines anglaises.
« Quoi ? Noon ! Tu me met une pression folle. » Son regard insistant et sa façon de me poser cette question me désarçonnais, ni l'un ni l'autre ne me posait de problème mais j'aurai adoré lui donner la réponse qu'il attendait. Et je devais bien avouer que cet air presque autoritaire pouvait bien lui aller. « J'ai envie de dire sucrée mais j'ai peur que ce ne soit pas la bonne réponse. » j'échappais un petit rire. « L'un ou l'autre ne me dérange pas, choisi ce qui te plait, je m'adapterai. »
Un homme s'approcha pour prendre nos commandes, le choix fut un peu précipité mais au fond je voulais juste passer du temps avec Bastien donc peu importe ce que j'allais manger du temps qu'il était à mes cotés. Le serveur s'éloigna en récupérant nos cartes. « Comment s'est passé ta journée ? » Nous ne nous étions pas vu aujourd'hui, ni même croisés ou envoyé un message.

 

Un petit plateau me semblait un très bon choix, Bastien connaissait bien mieux que moi ce genre de restaurants, ce qu'ils proposaient comme plats et surtout si ce que nous allions commander allait suffisamment caler nos estomacs.
« Ça me va, je te fais confiance. » un petit sourire s'afficha sur mes lèvres avant qu'il ne disparaisse à la question qui ressemblait bien à un dilemme. Un peu torturé entre les deux idées, celle qui me paraissait la meilleure fut la réponse donnée et par chance, ce fut exactement ce qu'il attendait. Le soulagement ne tarda pas à se faire ressentir et je crois même avoir laissé un petit soupir m'échapper.
« Tu aurais osé me laisser seul à table ? » je plissais les yeux « Essaie même qu'une fois, et tu sera privé de dessert. » j'avais pris soin de parler doucement, ne pas me faire entendre des autres tables. Mais même si ces mots étaient prononcés avec un grand sérieux, mon sourire fini par me trahir. Bastien, fidèle à lui même, me proposa tout de même de prendre les deux sauces afin que je puisse goûter.
« Ne t'en fais pas. Sucré c'est parfait. »
La commande passée, je me lançais un sujet complètement banal histoire de combler le vide. Il y avait tellement de choix parmi les possibles discussions à avoir, mais c'est bêtement les cours qui m'avaient traversé l'esprit.
« Tu n'as pas déjà commencé à réviser ? C'était quoi ces bouquins que tu lisais tout à l'heure ? » Ce n'était pas dans mes habitudes de prendre un roman pour lire, alors l'idée ne m'avais même pas traversé l'esprit en repensant à Bastien concentré sur sa lecture de tout à l'heure. « Moi ça allait, une journée normale et des cours qui se sont terminés plus tôt que prévu. » Je levais les yeux au ciel comme pour fuir le commentaire que je m'apprêtais à faire. « Surtout parce que je l'ai décidé en fait. » En effet, ma dernière heure de cours ne m'intéressais pas et l'option de quitter les lieux en douce s'était naturellement présenté à moi. En attendant, j'avais tout de suite pensé à aller voir Bastien, personne d'autres ne m'avais semblé plus important.

Nous ne mirent pas longtemps à terminer le plateau qu'on nous avait servi. J'avais bataillé avec les baguettes pour les garder stables entre mes doigts, prenant exemple sur Bastien et les astuces qu'il me soufflait pour arriver à me débrouiller comme il faut. Mes grands-parents aimaient beaucoup voyager et faisaient régulièrement partager les cultures qu'ils découvraient, alors manger avec des baguettes était quelque chose que je faisais chez eux mais peut-être que ce n'était pas encore assez pour maîtriser cet art.
« Tu as encore faim ? Ou tu veux faire quelque chose d'autre ? Après tout, on n'est pas obligés de rentrer tout de suite. » Lui proposer de faire quelque chose d'autre après ce repas, ça ressemblait presque à un rencard officiel. C'était un peu effrayant et je me senti rougir sans vraiment savoir si c'était de l'embarras ou autre chose. En attendant, lui proposer de continuer cette sortie, c'était peut-être aussi pour lui prouver que je n'étais pas là uniquement par intérêt.

 

Malgré toute la discrétion que j'avais eu à répondre à la provocation de Bastien, je ne me sentais pas totalement à l'aise d'avoir prononcé ce sous-entendu criant et encore moins lorsqu'il me répondit. Tentant de ne rien laisser paraître, j'affichais simplement un sourire en espérant ne pas me mettre à rougir de honte. Mon silence conclu cet échange pourtant si plaisant, mais quelque peu troublant pour ma part en public. Je sautais ensuite volontiers sur l'occasion de changer de sujet.
« Niais ? A ce point ? » mon regard devint suspicieux « Bon, tu ne me donneras pas envie de lire, c'est sûr. Mais qui sait, tu pourrais être surpris, l'histoire pourrait m'intéresser. Tu peux me raconter. » c'était surtout de la curiosité puisque lire n'avait jamais été mon activité favorite. Il savait très bien que je préférais le domaine sportif à l'intellectuel et c'est d'ailleurs cette différence qui faisait qu'on se complétait à merveille.
Le sujet des cours fut rapidement évoqué et je lui avouais alors avoir séché quelques uns d'entre eux pour le retrouver plus tôt. Je n'ajoutais rien à ses paroles, me contentant de sourire en baissant les yeux un instant. Passer du temps avec lui était quelque chose dont je raffolais, mais c'était bien meilleur lorsque nous étions en privé et je ne pouvais m'empêcher de culpabiliser un peu de la situation. Il était heureux que je l'ai retrouvé plus tôt alors que je n'assumais clairement pas ce qu'il y avait entre nous en dehors de sa chambre de bonne. C'était triste.
Le repas fut parfait, Bastien avait raison c'était juste assez pour caler nos estomac sans que ça ne soit trop. Après la dernière bouchée, je proposais à mon ami de continuer la soirée ailleurs, à mon grand étonnement d'ailleurs. Ce soir, j'avais vraiment envie de prendre sur moi et de lui prouver que je n'étais pas avec lui juste par intérêt. « Une balade c'est parfait, ça va nous faire du bien de marcher un peu. » Connaissant le coté romantique de Bastien, je m'attendais déjà à ce qu'il sache exactement où aller se promener, surement un endroit où on pourrait voir la tour Eiffel s'allumer ou quelque chose du genre. A aucun moment je n'avais pensé à l'horreur qu'était cette eau, encore moins a la pollution générale. « Quoi ? Tu rêve là ! » Bastien voulait m'inviter et il était hors de question qu'il règle pour ce repas. Par chance, il perdait du temps à fouiller dans son sac alors que je n'avais qu'à sortir ma carte de ma poche pour payer l'addition. Au comptoir, après s'être un peu chamaillé, je fini par avoir le dernier mot. Nous quittions ce restaurant sur une bonne note, plutôt amusés. Et comme les rues de la ville étaient encore un peu inconnues, Bastien me servit de guide jusqu'au bord de la Seine. La ville, à cette heure, était relativement calme et c'était un vrai contraste avec la fourmilière que c'était en plein jour. Nous avancions sans un bruit, dans un silence assez léger. L'ambiance entre nous était détendue, mais mon regard ne pouvait s'empêcher de surveiller autour de nous. J'étais à l'affût de la moindre attention qu'on aurai pu nous porter, que ce soit un commentaire, un rire ou même un regard. J'étais incapable de me concentrer sur le moment que je partageais avec Bastien, trop occupé à me demander ce que les autres pouvaient penser de nous.

 

J'écoutais avec beaucoup d'attention l'histoire qu'il était en train de lire et ce fut une très bonne chose parce que, pour comprendre il fallait bien suivre.
« Attend trente secondes. » Un silence s'installa quelques secondes, le temps d'assimiler toute l'histoire correctement. « Son ancien amant ? » c'était le plus évident à mes yeux, mais je ne trouvais pas que c'était niais pour autant. « C'est pas niais, disons que c'est prévisible. Mais ce genre d'histoire se vendent bien, donc pourquoi en faire de différentes ? » Les deux amants poussés l'un vers l'autre par le destin, c'était un énorme stéréotype, mais ça faisait aussi rêver n'importe qui.
« Je t'ai invité, il était hors de question que tu règle dans ces conditions. Alors, pour la prochaine fois, débrouille toi pour que je sois ton invité. » Je m'étais précipité pour régler la note et l'avais devancé de justesse. Comme je lui avais proposé l'idée de venir manger, il était normal que l'addition me revienne et je n'en démordrais pas. De toute façon, c'était payé et nous étions déjà en train de marcher dans les rues assombries de la capital française. Le silence qui s'était installé n'était pas vraiment lourd, mais il commençait peut-être à devenir gênant à cause de ma fâcheuse tendance à observer autour de nous comme si nous étions suivis ou épiés. Heureusement, Bastien trouva le sujet idéal pour me faire parler.
« Il y a un gros match dans deux semaines et certains recruteurs d'autres écoles vont venir. » je ris de manière un peu gêné. « On dirait qu'on est dans une série américaine à m'entendre. » Mon regard continuait de vagabonder ailleurs « Mais l'équipe dans laquelle je suis est réputée et tous les ans on recrute quelqu'un qui finira par en faire son métier. J'aimerai bien être ce gars cette année. » Cette fois, mon regard se planta dans le sien. « Et oui, vous pourrez venir m'encourager si vous voulez. Ça me ferai même plaisir. »
La marche n'était pas désagréable, mais l'impatience était en train de me gagner. Nous étions sorti à l'extérieur tous les deux, pour une fois sans nos autres amis, rien que nous et je pensais que ce serait suffisant pour lui prouver que je tenais réellement à notre histoire. Mais je voulais aussi passer du temps avec lui sans penser aux jugements extérieur.
« Ça te va si on rentre ? » le plus sportif des deux qui ne voulait plus marcher, voila un joli comble. Mais il allait surement comprendre cette demande, ou ce qui se cachait derrière. Mon attention n'était pas de rentrer pour aller s'ennuyer derrière un film ou ce genre de choses, non, je voulais retrouver notre proximité et il n'y avait que dans un lieu privé que c'était possible. Au mouvement de son visage, je compris son approbation et notre chemin changea de destination. Nous nous dirigions calmement vers l'immeuble où il vivait, échangeant encore quelques mots dans la douceur de la nuit et la pénombre des rues. Même si mon regard passait beaucoup de temps à surveiller ce qui nous entourait, il en passait aussi à observer le visage du beau bouclé qui me tenait compagnie. C'était une agréable soirée que nous venions de vivre et je pensais que ça pourrait suffire à faire oublier qu'Abby avait la place que méritait Bastien dans ma vie. Une fois devant la porte de la chambre de bonne qu'occupais le jeune français, je commençais à me laisser un peu plus aller aux marques d'affections, passant une main dans son dos pour l'inciter à entrer avant de le suivre.

 

Un grand sourire s'affichait sur mon visage tandis que Bastien parlait de l'histoire qu'il était en train de lire. Il avait ce côté romantique qu'il adorait retrouver dans les romans et je trouvais ça vraiment adorable. Je ne fis aucun commentaire supplémentaire lorsqu'il me partagea son souhait que cette histoire se termine bien. Même si c'était ce qu'il y avait de mieux, j'étais le genre à aimer me faire souffrir et préférer les fins qui sortent de l'ordinaire (donc la plupart du temps des fins peu heureuses). Mais ce n'était pas comme si je lisais réellement, ma comparaison se faisait surtout par rapport aux histoires de films.
Cette promesse d'une prochaine fois me fit du bien, plus que je ne l'aurai cru. Cette sortie tous les deux n'avait pas été catastrophique, ça s'était même plutôt bien passé malgré une grosse appréhension de me retrouver seul à seul avec lui dans un lieu public. Personne n'avait vraiment eu d'intérêt pour nous, nous étions vraiment passés comme deux amis, ce qui avait un côté rassurant. Et même pendant notre petite balade nocturne, nous n'avions attiré aucunes attentions, aucuns regards curieux.
« Merci pour ton enthousiasme, je ferai de mon mieux et on verra si je suis pris. Et sinon je n'aurai qu'a choisir une université avec une bonne équipe. » Je haussais les épaules. Les bonnes équipes universitaires, ce n'était pas ce qu'il manquait, c'est réussir les sélections qui était plus compliqué. Et apprendre que mes amis seraient là pour m'encourager le jour de ce gros match, allait certainement me pousser à dépasser les limites.
La nuit était calme, autant que notre conversation qui venait de s'éteindre en douceur. Le silence n'était pas pesant mais je proposait tout de même de rentrer chez lui, proposition qu'il acceptais sans broncher. C'était la première fois que nous passions autant de temps rien que tous les deux en dehors de son logement, c'était une très bonne chose mais j'avais aussi besoin de retrouver une connexion plus intime avec lui.
Alors nous arrivions rapidement chez lui, toujours au son calme de nos pas raisonnant sur le béton du trottoir. Devant sa porte d'entrée, je me sentais beaucoup moins tendu, plus à même de lui montrer de l'affection. Le regard des autres était quasi inexistant ici, et disparaissait complètement à l'intérieur.  J'affichais un nouveau sourire alors qu'il me remerciais de cette soirée, elle m'avait fait du bien aussi. Mais je n'eus aucunes réponses, trop concentré sur les lèvres qui venaient de prononcer ce remerciement. Il dû certainement le remarquer parce qu'il fut le premier à céder à la tentation en s'avançant pour m'embrasser. La douce sensation de ses lèvres contre les miennes m'envouta, poussant mon esprit à se déconnecter entièrement. J'avais envie de profiter de cet instant, de ce toucher qui me faisait vriller au moins autant que ces baisers qui me brûlaient. Et je me mit à sourire contre ses lèvres en comprenant qu'il n'allait pas décrocher son téléphone, qu'il préférait me faire passer au premier plan et se laisser aller à ce plaisir interdit au goût délicieux. J'agrippais son tee-shirt pour l'attirer davantage contre moi, glissant ensuite mes mains sous ce tissus afin de retrouver le contact de sa peau chaude sous mes doigts. J'étais devenu complètement dépendant de ce genre de rapprochement, à tel point que plus rien n'avait d'importance autour de nous et que même la culpabilité ne parvenait pas à rompre cet instant. Il n'y avait que lui qui comptait, ses lèvres contre les miennes, son parfum envoutant, ses bras autour de moi. Il y avait cette envie, ce désir infini pour lui qui me dictait de ne pas être raisonnable et j'envoyais alors son tee-shirt rejoindre le plancher pour mieux redécouvrir son torse du bout de mes doigts, suivi de près par mes lèvres. Rien n'aurai pu nous arrêter en si bon chemin, rien sauf des coups à la porte d'entrée. La force de ce geste fit raisonner les bruits à travers toute la pièce à tel point que je m'écartais de Bastien comme si sa peau m'avait brûlé. Il me fallut quelques secondes pour me remettre de mes émotions. « Tu attends quelqu'un ? » lui demandais-je le souffle court, les lèvres et les joues rougies.

 

Le retour jusqu'à l'appartement de Bastien -du moins son petit logement- semblait mettre un temps interminable. Cette impression était due à l'impatience que je ressentais d'enfin me retrouver seul à seul avec lui dans un lieu privé et nous savons tous ce que cela impliquait. Alors lorsque la porte se ferma sur nous, c'est volontiers que je cédais à cette irrésistible tentation. Nos lèvres se retrouvèrent et nous laissions parler nos corps désespérément attirés l'un par l'autre. J'en avais tellement envie que plus rien n'existait autour de nous, plus rien n'avait d'importance à part lui. Mais le destin en avait décidé autrement, peut-être avait-il envie de nous punir d'agir de la sorte sans même avoir une once de culpabilité à l'encontre de ma petite amie. Quelqu'un frappa à la porte et, de ce geste, interrompu immédiatement notre rapprochement. Je m'écartais brutalement et il nous fallu quelques instant pour reprendre nos esprits avant de réaliser ce qu'il venait de se passer. Je laissais Bastien se rhabiller en m'expliquant qu'il n'attendait personne et j'espérais qu'il avait raison, que ce n'était qu'un voisin qui avait un soucis, qu'il avait besoin de sel ou je ne sais quoi et que ça ne prendrait qu'un instant. Il s'approcha de sa porte en passant une main dans ses cheveux histoire de leur donner un peu d'ordre et l'ouvrit sur la dernière personne que nous aurions souhaités voir. Je ne la voyait pas, mais sa voix me fit tout de suite comprendre son identité et mes paupières se fermèrent dans un soupire d'agacement. C'est peut-être pire que tout d'entendre Bastien mentir à son amie, même si c'est une excuse pour nous protéger et dissimuler notre relation. Il n'a jamais été comme ça, il était même l'honnêteté et la bienveillance incarnée. C'est de ma faute s'il agit de cette manière et qu'est ce que ça lui apporte ?
Lorsque Bastien ouvrit la porte, je levais la tête vers Abby et lui offre un petit sourire. Elle en profita pour entrer et venir près de moi où j'esquive de justesse ses lèvres pour qu'elle ne les déposes qu'au coin des miennes. Ce n'était pas pour la contrarier, je ne me sentais simplement pas capable de l'embrasser devant Bastien et encore moins juste après avoir partagé un baiser si intense avec lui.
« Ça faisait longtemps qu'on s'était pas vu, c'était l'occasion de parler un peu et de nous mettre à jour sur ce qui se passe dans nos vies respectives. » Elle vint se blottir contre moi et je passais mes bras autour de sa taille même si j'avais conscience que ce n'était pas le spectacle le plus agréable aux yeux de mon amant. La situation était toujours très délicate lorsque nous nous retrouvions tous les trois au même endroit. « Super. Tu lui as dit pour ton match ? » J'affichais un petit sourire à ces paroles, c'était en effet un des sujets que nous avions abordés. « Oui, et il va venir m'encourager avec Paco. Enfin, Paco n'est pas encore au courant mais Bastien a déjà prévu de sortir les pompom pour me soutenir. » Elle se mit à rire et j'espérais détendre l'atmosphère avec cette taquinerie. « C'est très gentil de sa part, mais ça ne m'étonne qu'à moitié. Bastien a toujours été comme ça. Heureusement que tu l'as comme ami. » Mon regard se leva vers celui du jeune homme et un sourire teinté de reconnaissance s'afficha sur mes lèvres. « Oui c'est vrai, j'ai de la chance de l'avoir. » Puis je réalisais qu'elle était venu me trouver et je me demandais ce qu'elle pouvait bien me vouloir. « Et, pourquoi tu me cherchais au fait ? » Je vis dans son regard une hésitation, comme si elle refoulait une contrariété. Elle avait certainement attendu que je précise que j'avais aussi de la chance de l'avoir elle dans ma vie, mais ce compliment n'était pas arrivé. Après une courte pause elle fini par répondre en s'éloignant de moi. « Il me faut une raison pour te voir maintenant ? » La situation n'était pas détendu, cette phrase venait de le prouver. « Abby, arrête, ne commence pas. » Son visage se ferma, sa mâchoire se crispa et on sentait bien qu'elle avait envie d'exploser mais qu'elle se retenait. Son caractère impulsif était impressionnant. Alors, pour éviter une dispute devant Bastien, je passais ma main dans le dos de la jeune femme pour l'accompagner vers la porte. « Bon Bastien, je suis désolé, j'ai passé une excellente soirée mais je pense qu'il est temps que je rentre. »


 

Imaginer Bastien jouer aux cheerleader pour me soutenir au prochain match était vraiment amusant et le fait qu'il entre dans ce jeu me faisais sourire. Ce commentaire avait eu l'effet escompté, il avait détendu l'atmosphère un instant.
« J'ai déjà hâte de voir ça ! » Il n'était pas normal que je sois plus excité à l'idée d'imaginer Bastien dans cette tenue que ma propre petite amie, tout comme il n'était pas normal qu'on mente sur notre réelle relation. C'était si compliqué à vivre. Abby m'avait permis de sortir la tête de l'eau, de respirer de nouveau. Grâce à elle, j'ai pu partir de Londres et mon père a arrêté son harcèlement. La quitter reviendrai à m'étouffer de nouveau de cette pression familiale et sociale, et j'ignorai sincèrement si j'en serai capable. Et à coté de ça, Bastien m'avais tant fait découvrir et tant fait ressentir. Le choix était douloureux parce qu'il y avait beaucoup trop de choses en jeu.
La conversation aurai pu rester légère si Abby n'aurai pas été fidèle à elle-même et n'aurai pas décidé de reporter l'attention sur elle. Je pris donc la décision de quitter les lieux avant qu'une dispute n'éclate.
« Tous les quatre ? » Elle posa son regard hésitant sur Bastien, un regard que j'ai bien trop connu et qu'il a surement reconnu tout de suite aussi. « Le prends pas mal, mais j'espère pour Paco que tu lui as pas mis le grapin dessus. » Je savais qu'elle avait des préjugés homophobes puisqu'elle avait grandit avec ce genre de commentaires désobligeants -c'était d'ailleurs la raison pour laquelle nos pères s'entendaient si bien- mais elle continuait à faire des remarques devant son ami. Elle n'aurai pas été si égoïste, elle aurai surement comprit que c'était extrêmement vexant, et pas seulement pour lui. « Abby ! Tu t'écoutes ? Laisse le vivre sa vie. » A mon ton ferme, elle comprit que je ne rigolait plus du tout et s'étonna même que je n'enchaîne pas avec d'autres commentaires comme j'aurai plutôt tendance à faire. Elle secoua la main comme pour effacer ce qu'elle venait de dire. « Oui, je respecte ne t'en fais pas. Mais loin de moi si possible. » Je poussais un long soupir en entraînant la jeune femme avec moi dans le couloir, soufflant un dernier au revoir à Bastien dans la foulée. Le silence s'installa entre nous alors qu'on descendait les escaliers jusqu'au hall d'entrée mais je le rompt en prétendant avoir oublié mon téléphone. A son air agacé, je compris qu'il n'était pas question qu'elle remonte toutes les marches et, honnêtement, ça m'arrangeait. Je fis donc demi-tour et grimpait les marches quatre à quatre pour rejoindre la chambre de bonne où vivais mon amant. Par chance, il n'avait pas eu le temps de verrouiller la porte alors j'en profitais pour rentrer rapidement. Si vite, d'ailleurs, qu'il a dû sursauter de surprise. Il était évident qu'Abby ne serai pas remontée, et, de toute façon, elle n'aurai pas pu faire aussi vite. Elle n'aurai donc pas comprit que j'avais eu besoin de revenir le voir pour qu'il sache que je tient à lui, pour qu'il comprenne que cette situation était de plus en plus invivable et que j'avais l'intention de mettre un terme à cette douleur qui nous rongeait tous les trois plus ou moins inconsciemment. Bastien se trouvait face à moi et son air de surprise disparu lorsque je m'approchais pour l'embrasser, savourant le goût de ses lèvres contre les miennes. Un regard attristé se leva vers le sien. « Excuse-moi. » murmurais-je. C'était bien plus douloureux de le voir souffrir comme ça que d'imaginer la réaction que pourrai avoir Abby si elle venait à tout apprendre. Je lui offrit un dernier baiser, bien trop court à mon goût, avant d'ouvrir la porte pour repartir. « Je t'aime. » Ces mots étaient sincère mais m'avaient échappés et je fus plus étonné que lui de les avoir prononcés. Mes joues se mirent à chauffer et je quittais cette pièce sans laisser le temps à Bastien de répondre quoique ce soit. Je dévalais les marches aussi rapidement que possible pour retrouver Abby qui m'attendais les bras croisés dans le hall. Je manquais subitement d'air et sortir dans la rue me fit un bien fou, même si c'était pour accompagner la jeune femme jusqu'à chez elle.