that makes me wanna shatter everything that i've done (ft. heidi)

— Je laisse échapper un soupir amusé quand elle m’assure qu’elle s’occupera des nouveaux arrivants qui oseraient mal se comporter ou dévier de l’idéologie de la ville. Malgré moi, je l’imagine très bien en gardienne des lieux avec sa poêle. « Ils devraient avoir peur. » Je lui adresse un sourire en coin, surpris par une telle hargne de sa part – même si c’est une blague. Je sais que moi, je ne me risquerais pas à faire quoique ce soit, même si je ne partage pas forcément les convictions qui font vivre cette ville, on ne peut pas dire que j’y sois opposé non plus.
Du courage, moi ? J’ai un goût amer dans la bouche quand j’entends ses mots, parce qu’elle ne sait pas à quel point elle a tort. Haussant les épaules, je fais mine que ce n’est rien. « Mh… je fais ça aussi. Mais bon, je suis bien obligé de bouger de mon canapé si je veux partir en vacances. » Entre autres. Comme le fait que j’ai des chats, un lapin et un petit-ami à nourrir ; alors je n’ai pas franchement le droit de me morfondre ou de me laisser aller à la déprime et aux idées noires. J’ai tellement peur de tout, depuis que je me traîne cette blessure. De ne plus jamais marcher, de ne plus pouvoir patiner, d’être un poids pour Paco ou de le dégoûter, de rester éternellement dépendant de ces béquilles de malheur. Mais ça, elle n’a pas besoin de le savoir. Pas maintenant alors que les choses ont l’air d’enfin aller correctement entre nous.
Quand elle se lève, je suppose que son arrêt doit être proche. Ou alors, qu’elle a désespérément besoin de s’enfuir de cette conversation qui recommence à tourner au vinaigre dans ma tête. Ce que je peux comprendre, j’aurais probablement fait la même chose. Je reste quand même soulagé qu’elle me dise qu’elle est contente de m’avoir croisé, parce que je ne l’imagine pas mentir sur ce genre de chose. « Moi aussi, c’est cool d’avoir pu se parler. » Avec un pâle sourire, je la regarde de haut en bas alors qu’elle s’accroche à la barre du bus, prête à descendre. « Rentre bien. »

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— Soulagé malgré moi qu’elle avale ce que je lui dis sans se poser de question, je lui rends son sourire. J’aurais pu lui dire la vérité, qu’en fait rien ne va. Mais j’ai la sensation que ça n’aurait pas traversé mes lèvres de toute façon. Une fois que le bus arrive à son arrêt, je hoche doucement la tête d’un air entendu. « Je te payerais un verre aux Bahamas. » Je fronce le nez avec un petit air espiègle, parce que ça sonne très bizarre à dire comme ça. C’est difficile de réaliser qu’on va tous partir en croisière dans peu de temps, tout semble si lointain. Je lui rends son signe de la main quand elle descend, et puis ma bonne humeur relative s’effrite tout doucement. Sans personne pour m’obliger à garder la face, j’ai du mal à maintenir l’illusion. Un peu comme une fin de soirée où tout le monde commence à dormir, la soudaine absence d’Heidi me provoque une sensation étrange de flottement. En train de déphaser pendant le reste du trajet, je manque de rater mon arrêt et saute du bus en catastrophe. Maintenant, je prends une grande inspiration en me dirigeant vers mon appartement – en sachant que Paco m’y attend, c’est moins compliqué de trouver la motivation d’avancer même si ce n’est pas tout rose en ce moment.

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