Lorsque le passé revient frapper à la porte [Paco]

Des jolies petites maisons en bois colorées, un centre-ville aux rues bien propres, de la nature dès que vous vous éloigniez de la ville et même la zone industrielle avait des bâtiments nets et des jolies haies pour agrémenter le tout. Un vrai décor de carte postale pour touristes pressés de tout voir en un minimum de temps. Et une véritable horreur pour tout graffeur qui se respectait. Bon sang, il les avait cherchés ses murs de béton gris et laissés à l'abandon ! Et il l'avait finalement trouvé son terrain de jeu, à l'arrière de la gare bien proprette elle aussi, dans les tunnels à l'arrivée des trains. Depuis, il venait ici deux à trois fois par semaine, pour retrouver un petit bout de son passé lorsqu'il clamait sa colère et sa révolte sur tous les murs de la ville. Où il y avait encore Illyana. Et où ce gamin le suivait à la trace et puisqu'il était là, il pouvait bien servir à quelque chose et il lui faisait porter le sac contenant ses précieuses bombes de peinture. Et aujourd'hui, il ne restait de cette époque que sa signature en bas de chaque fresque Tmy. Et son style évidemment, même si les dessins avaient eux changé. Exit les couleurs pour ne se concentrer que sur le noir, le blanc et les touches de rouge. Et cette petite fille toujours de dos, parfois seulement représentée par le ballon rouge qu'elle tenait qui s'envolait dans un ciel gris.

Ce soir n'aurait dû déroger en rien aux autres soirs. Dans trois heures, il serait sur le bateau pour y exercer son nouveau métier. Passer des entretiens des espaces verts à marin-pêcheur... Quoique le marin était de trop là-dedans ! Il se contentait donc de pêcheur, ce qui était déjà surqualifié au vu de ce qu'il faisait. Transporter des caisses de poissons et être aux ordres de vrais marins, eux ! Non, parce que vous aviez déjà vu un marin avec le mal de mer ? Ce qui lui faisait penser qu'il avait ses médicaments contre le mal des transports à prendre... Récupérant le sac à dos US Army, il en tira un comprimé de la plaquette, qu'il laissa fondre sous la langue. Il en prendrait un autre lorsqu'il monterait sur le bateau, ce qui devrait lui permettre de faire l'aller et le retour à peu près correctement. Paraitrait qu'il s'habituerait... Eh bien, c'était pas encore gagné ! Tout comme il n'était pas sûr de s'habituer à la  vente au petit matin du poisson sur le marché alors qu'ils parlaient tous norvégien là-dedans et qu'il n'y comprenait toujours pas un traite mot.

Mais pour le moment, il ne se trouvait ni sur le bateau, ni sur le marché mais face à cette immense toile grise qui s'offrait à lui. Il se permit même un léger sourire alors qu'il avait sorti la bombe noire du sac qu'il secouait vigoureusement. Mais alors qu'il levait le bras pour le premier jet de peinture, il se retourna soudainement vers l'autre côté du tunnel, de l'autre côté des rails. Il y avait quelqu'un, son sixième sens aguerri par les années de prison ne le trompait jamais à ce niveau-là ! "Qui est là ? Sortez de là !" Il avait réagi d'instinct et le Français lui était naturellement venu à la bouche. Sauf que le Français n'était sans doute pas la meilleure des langues à utiliser ici, il reprit donc en anglais cette fois-ci mais de façon toujours aussi méfiante. "Qui est là ? Sortez de là !" Sa main s'était crispée autour de la bombe alors qu'il calculait ses possibilités de fuite. C'est que le Viking n'était pas derrière ses fesses cette fois-ci, et il allait plutôt avoir intérêt à courir vite, quoi qu'on puisse vouloir de lui. La sortie la plus proche était aussi celle où il en fallait que traverser les rails pour le choper. Restait à courir le long du tunnel pour en sortir par l'autre bout, ça restait sa meilleure chance. Mais pour le moment, il fallait encore qu'il sache ce qu'on lui voulait... Les flics ? Possible. Ca faisait un moment maintenant que les graphs se multipliaient dans les tunnels d'arrivée des trains. Mais ce n'était pas ça. Il sentait que ce n'était pas ça.

Récupérant son sac par une des lanières, il ne lâchait pas l'autre côté du tunnel du regard. Et il y avait bien un type à contrejour et apparemment seul qui s'amenait vers lui. Et il n'aimait pas ça, son instinct lui hurlait de fuir, que ça n'allait pas lui plaire... Son corps tendu, prêt à bondir pour courir à l'autre bout du tunnel, il ne quittait pas des yeux la silhouette qui s'avançait vers lui alors que son corps lui envoyait signaux d'alerte sur signaux d'alerte. Il devait dégager de là et vite ! "Qu'est-ce que vous voulez ?!" Et alors qu'il commençait déjà à vouloir faire demi-tour pour piquer le sprint de sa vie, il put enfin voir à quoi il ressemblait et il se figea net. Est-ce que lui l'avait reconnu ? Il avait la capuche de son sweet noir sur la tête et il avait dû changer en dix ans... Mais bon sang, lui aussi avait changé, et pas qu'un peu. Où était donc passé le gamin qui le suivait où qu'il aille ? C'était... déroutant. Secouant la tête, il recula de quelques pas alors qu'il disait en Français. "Il doit y avoir erreur sur la personne. Désolé..." Il n'y aurait pas de graph ce soir. Il devait juste partir et retourner au port...

La mâchoire qui se serre et la main qui se crispe sur la lanière de son sac. Il aurait dû faire demi-tour et aller au port. Il aurait dû ! Ce présent ne ressemblait plus en rien aux souvenirs du passé. Parce qu'il n'y avait pas que le physique qui était différent mais la voix aussi. Normal, c'était un gamin à l'époque ! Ado, deux malheureuses années ressemblent à une vie entière... Mais maintenant ? Maintenant, c'était un homme qui lui faisait face. Mais tout son être savait qui il était. Il savait.

Mais lui ne le reconnaissait pas ?... Impossible ! Il était celui qui avait le moins changé des deux. Du moins physiquement. En une fraction de seconde, il fit le lien avec sa signature en bas des graphs. Il l'avait attendu comme un chat attendait la souris... Il n'était pas étonné, ça fonctionnait toujours comme ça. Restait maintenant à déterminer... La suite ? Mais bon sang, le retrouver ici, en Norvège, c'était... dingue ! Lui qui s'était évertué à refuser sa présence au parloir -ce gosse n'avait rien à y faire, surtout pas en prison- il le retrouvait là, sous un pont ferroviaire en Norvège ! Mais bon sang, c'était quoi cette manie qu'il avait de le suivre à la trace ?! C'était de la folie ! Ou c'était juste cette chienne de vie qui s'amusait encore à ses dépens... Ce qui était encore possible. Et il n'était pas sûr que ce soit beaucoup mieux.

Se frottant les yeux pour remettre ses idées en place, il opta pour prendre les choses comme elles venaient. Il aurait bien le temps d'analyser tout ça plus tard. "Et depuis quand je te laisse la primauté sur les choses..." C'était revenu presque naturellement et il en était le premier surpris. Le ton arrogant, le petit sourire en coin moqueur et en-dessous cette douceur qu'il avait toujours autant de mal à camoufler. Et c'était comme une gifle qu'il se serait pris en pleine face. Ce qui ne l'empêcha pas de rajouter, juste pour marquer le point. "Gamin. Bien que ce ne soit plus vraiment d'actualité..." Au moins, il pouvait lui concéder cela. Alors qu'il ne parvenait pas à décrocher son regard de lui, cherchant à cataloguer toutes les différences avec l'image qu'il en avait gardé. Et Dieu sait s'il y en avait ! Et malgré tout, il pouvait deviner -presque sentir- le Paco d'il y a dix ans... Est-ce qu'il en était de même pour lui ? Et cette question l'agaça à la seconde où il se la posa alors qu'il s'obligeait à enfin détourner le regard. Quelle importance après tout ? Le passé ne se rattrapait pas.

La moue boudeuse, il en haussa les épaules à la question du graph. Comme si ça avait encore une quelconque importance après cette boucle temporelle... A la place, il lui lança la bombe de peinture noire qu'il avait toujours en main. "Vas-y, montre-moi ce que tu vaux maintenant..." Et il faudrait peut-être qu'il pense à arrêter avec ces petits sourires en coin qui apparaissaient en dehors de son contrôle... Désignant le mur d'un mouvement de tête, il ajouta grand seigneur. "Le mur est à toi. Fais-toi plaisir." Et alors qu'il parlait, il avait croisé les bras et avait posé son épaule sur celui-ci pour prendre appui dessus. Tandis que son regard était revenu se scotcher à lui.

C'était tellement bizarre... Plus de dix ans s'étaient écoulés, et ils se retrouvaient dans une ville de Norvège !, à discuter graph comme s'ils s'étaient vus la veille. Quoique... Il y avait tout de même eu quelques petits changements physiques entre-temps, et des plus appréciables il fallait bien l'avouer. Du moins pour Paco parce que lui... La prison était passée par là. C'était même d'ailleurs à se demander pourquoi il était venu le voir ici ce soir. Comme il le disait si bien, lui taguait à Fredelig Gate... "Apparemment, tu es ici depuis plus longtemps que moi..." Et c'était plus une constatation qu'une question.

Par contre, le il va falloir t’y faire le surprit, et à plus d'un titre. Autant parce que ça impliquait le fait qu'ils se reverraient, et que donc Paco souhaitait ça -chose dont il ne sut d'ailleurs pas comment y réagir-  que parce que Paco avait raison. Il allait devoir s'y faire à ce gamin qui n'avait définitivement plus rien d'un gamin. A commencer par cette assurance qu'il avait face à lui et qui n'existait pas avant. Et cette façon qu'il avait de vouloir se mesurer à lui qui était... Bien plaisante. Et s'il y avait dans son geste inconscient à relever ainsi la tête une réminiscence du passé, il ne s'agissait plus de s'opposer à lui pour défendre bec et ongles quelqu'un d'autre. C'était juste entre eux... "Eh bien après le gamin, voyons voir ce que donne l'homme... Qui sait ? Je pourrais être surpris." Le "Surprends-moi" n'était pas dit mais était tout de même là, en suspend dans l'air alors que son regard à la lueur amusée ne décrochait pas une nouvelle fois de lui... Et bon sang, il risquait même de s'y faire un peu trop vite !

Et pour mieux faire passer le message, il lui envoya la bombe de peinture le mettant au défi de lui prouver de quoi il était maintenant capable. Même s'il ne doutait pas qu'il serait à la hauteur. Il n'avait pas arrêté le graph et il avait eu dix ans pour améliorer un style déjà parfaitement reconnaissable. Se décollant du mur pour lui laisser la place, il haussa un sourcil à sa demande. "Ce n'est pas pour toi que je l'ai mise..." Et si son ton laissait penser qu'il n'enlèverait pas sa capuche, il le fit tout de même dévoilant davantage des traits sans doute plus anguleux et un rictus amer. A quoi s'attendait-il ? A retrouver le gamin -parce que lui aussi n'avait été qu'un gamin- qui pensait encore pouvoir s'en sortir une fois sa majorité venue ? Et qui croyait en plus pouvoir prendre sa petite sœur en charge ? Belles conneries que tout cela... Mais pas plus qu'il n'en avait parlé à l'époque -pour dire quoi ? Que son père le cognait dès qu'il avait bu un verre de trop ?- il se limita à ce geste. A Paco d'en tirer les conclusions qu'il voulait.

Et à défaut, il y avait ces quelques mots échangés nageant dans la superficialité comme si tout était normal. Alors que rien n'était moins vrai. Mais est-ce qu'il avait vraiment envie de savoir pourquoi Paco se trouvait ici ? Bizarrement, il sentait que ça risquait de ne pas lui plaire et il avait appris à écouter son instinct... En règle générale. Mais il n'était pas non plus du genre à faire l'autruche et à fuir les choses désagréables, même lorsque son instinct lui hurlait de le faire. Alors il posa tout de même la question. "Qu'est-ce que tu fais ici ?" Tout en précisant aussitôt parce qu'il avait bien compris qu'il l'avait attendu ce soir sous ce tunnel parce qu'il avait dû tomber sur un de ses graphs signés. "A Bergen, chez les vikings... C'est un peu loin de Paris." Parce que oui, il avait un peu de mal avec la Norvège. C'est que dans moins de trois heures maintenant, il sera en train de lutter contre le mal de mer tout en faisant face aux embruns et à l'eau froide... Même si passer la tondeuse toute la journée et désherber les parterres n'avait pas été beaucoup mieux. En tout cas, la question aurait tout à fait pu lui être posée à lui aussi mais c'était lui qui la posait en premier. Et là, ce n'était plus le graph qu'il regardait avec un air intéressé mais bel et bien Paco.

Comment ne pas sourire à ça ? Bon sang, on pouvait dire que Paco savait lui renvoyer la balle... Parce que si, il avait été surpris et pas qu'un peu. Mais il y avait de quoi ! C'était un passé depuis longtemps enterré qui ressurgissait du néant. Jamais, oh grand jamais, il n'aurait pensé revoir Paco, et encore moins ici ! C'était juste... fou. Complètement fou. Mais une folie bien attractive alors que son regard avait du mal à quitter la silhouette avantageuse de Paco. Mais bon sang, où était passé le gamin qu'il avait connu ? "Je ne m'attendais pas à te trouver ici, c'est sûr. Ni même à te trouver... Si changé." Mais bon, dix ans, c'était un peu normal. Tout comme cette réserve qu'il y avait entre eux, presque pudique. Et ces quelques phrases échangées qui ne reflétaient que très partiellement tout ce qui se jouait dans les silences ou les non-dit. Parce que l'air en était saturé. Paco avait vu un de ses graphs et il l'avait attendu, pour le voir... Pour lui parler... Pourquoi ?

Trop de questions et définitivement pas assez de réponses. Et ce n'était pas les réponses sibyllines de Paco qui allait l'aider à y voir plus clair. Refaire sa vie... Pas sûr que lui refaisait la sienne, il la laissait plutôt couler de ses mains comme du sable entre ses doigts ouverts. Parce qu'en vérité, il se contentait d'essayer de ne pas tomber malade en pleine mer et de comprendre un minimum le Norvégien. Ce qui était peu comme objectifs dans une vie... Mais est-ce qu'il avait vraiment envie que Paco sache ça ? Ce même Paco qui l'avait regardé avec des étoiles plein les yeux pendant tant de temps. Avant qu'un abruti ne débarque et ne vienne lui voler ce qui lui était dû... Mais dix ans après, il aurait été presque logique que les choses aient là aussi totalement changé. Il n'aurait plus manqué que ce soit lui qui le regarde aujourd'hui avec ce regard admiratif ! Bien que ça, non. Ou alors il n'en laisserait rien paraître, et il était plutôt bon à ça. Et s'il le détaillait ce soir, c'était juste parce qu'il devait faire avec une nouvelle image du "Gamin" ! Bon sang, il était vraiment pitoyable...

Donc Paco en était à devoir refaire sa vie ? C'était toujours une info et toute information était bonne à prendre. Surtout là alors qu'il ne connaissait plus rien de ce Paco soudainement devenu Norvégien, quoique la Norvège lui allait à merveille. Et visiblement, pas que physiquement ! Le Blood Night, rien que ça... Il connaissait, forcément, ne serait-ce que de nom. "Ah ?... Jamais mis les pieds là-bas." Pas le temps, pas l'envie et pour y faire quoi de toute façon ? Il avait bien tenté de renouer avec les femmes à sa sortie de prison mais le résultat s'était révélé décevant. Il était vrai qu'il n'avait jamais aimé leurs cheveux longs dans lesquels ses doigts s'emmêlaient ou tout le maquillage qu'elles pouvaient se tartiner sur la peau. Mais là, ça l'avait plus révulsé qu'autre chose. Il ne pouvait pas. Il ne pouvait plus faire semblant et se dire que même si c'était pas terrible, ça restait bien quand même. Dieu, sa vie était vraiment partie en vrilles.

Bougeant enfin, il alla se placer face au graph de Paco qu'il observa un long moment avant de laisser échapper d'un ton appréciateur. "Cool..." Un simple mot mais bien plus chaleureux que tout ce qu'il avait pu dire jusqu'ici. C'est qu'une fois la surprise passée, et la température de l'eau prise, il se sentait plus en confiance... Ou c'était peut-être plus simplement l'effet "Paco Lombardi" qui agissait sur lui. Quoi que cela puisse être, il se retrouva cependant à lui proposer une visite. Il ne manquait plus que la tasse de thé et les petits gâteaux ! Cette fois-ci c'était acté, sa vie partait bel et bien en vrilles... "Je passerais peut-être au Blood Night un de ces jours... Tu me feras visiter. Je suis sûr que tu dois avoir un super bureau de grand patron avec fauteuil en cuir et tout le toutim. Je me trompe ?" Et c'était le genre de question qui n'attendait qu'un seul type de réponse. Et avec toujours son petit sourire en coin, qui était cependant devenu presque complice...

La réponse tomba aussitôt comme une balle rattrapée au vol et retournée dans le même geste à son expéditeur. "Pur canon... Ca, c'est toi qui le dit." Et avec juste ce qu'il fallait de provocation dans le ton alors qu'il levait un regard amusé vers lui. Parce que Paco n'avait certainement pas besoin qu'on rajoute de l'eau à son moulin. Mais c'était surtout le passé employé qui l'avait frappé. Parce que c'était un temps révolu où ce gamin lui courrait après. Ca avait même été révolu dès l'apparition de ce type qu'il n'avait pas pu encadrer dès qu'il l'avait vu. A assumer de façon si décomplexée ce qu'il était alors que lui était pris dans un carcan familial qui le bouffait jour après jour. Et qui se permettait en plus de faire les yeux doux à Paco, chose qui avait très bien fonctionnée par ailleurs. Alors ouais, l'emploi du passé était de mise et depuis belles lurettes.

Mais ce n'était pas pour cela qu'il allait gentiment se conformer à ce qu'on attendait de lui. Il avait dit qu'il passerait un de ces jours prochains au Blood Night, et il comptait bien le faire. Et sans attendre une quelconque permission de qui que ce soit. Il haussa donc un sourcil perplexe au "mérite" et au "privilège" sans pour autant faire le moindre commentaire là-dessus. Et pourtant il aurait eu à dire ! Parce que depuis quand il devait mériter les choses lorsqu'il s'agissait de Paco ? C'était un sacré renversement de situation et il n'était pas sûr d'apprécier ce nouveau mode de fonctionnement. Quoique, rien ne l'obligeait à y aller. Il pouvait très bien oublier le Blood Night et toute cette rencontre. Dix ans avaient passé après tout, et l'eau avait coulé sous les ponts... Suffisamment d'eau pour retrouver un type qui n'avait plus grand-chose à voir avec le Gamin qu'il avait connu.    

Et pourtant, il savait déjà qu'il irait. Parce que ce nouveau Paco l'intriguait, parce qu'il retrouvait malgré tout celui qu'il avait connu dans ce regard plein de promesses qu'il lui dédia, et parce qu'il n'avait pas pu lui partir avant que Paco ne le fasse. Et c'était sans doute ça qui le perturbait bien plus que tout le reste. Il aurait dû se détourner et partir, et il ne l'avait pas fait. Et il se retrouvait là, seul face au graph qu'avait fait Paco, preuve moqueuse de son bref passage ici... Un passage qui venait de chambouler totalement la vie morne et sans grand attrait qu'il se construisait depuis son arrivée à Bergen. Soupirant, il décrocha son regard du graph et colla la bombe qui lui avait été rendue dans son sac avant de se décider enfin à rejoindre le port. Il n'y avait pas à douter qu'aujourd'hui son mal au cœur ne viendrait pas que des roulis du bateau.