{ GOD JUL, LE RETOUR }

Etait-il nécessaire qu'Allan avait un amour inégalable avec les fêtes de fin d'années ? Par chez elle, Noël était un prétexte pour toutes les fantaisies, et la Norvège ne s'épargnerait pas la tenue du jour : une robe chaude, certes, mais aux couleurs rouge et blanche d'une mère Noël plus mignone que réellement emmitouflée. La fausse-fourrure l'enveloppée dans un tissu rembourré qui partait de son cou jusqu'à ses genoux, empruntant à la mode russe le grandiloquant... les paillettes en plus. Mais Allan savait très bien qu'il manquait une touche PRIMORDIALE à sa tenue : elle voulait un bâton de sucre d'orge, et voilà qu'elle se trouvait particulièrement fâchée de ne pas en trouver.
—  Mais comment ça il n'y a pas de sucre d'orge !! Les bâton rouge et blanc !   s'exaspéra-t-elle en français en passant au milieu d'un regroupement de personnes sans les voir.

Noël et ses couleurs, Noël et sa fausse harmonie familiale, Noël et le dédain d'Ulrich pour les fêtes de fin d'années qui ne perdait pas en intensité avec le temps. Cela ne l'empêchait pas de passer un peu de temps avec sa jeune soeur ou son père, mais le fantôme insupportable de sa génitrice ne rendait pas les choses plus aisées ; sortir lui faisait du bien.
En forte bonne santé, Ulrich ne craignait que peu les basses températures, même si laine et bonnets l'accompagnaient dans la péripétie... de la recherche d'un gauffre. C'est par pur hasard et au détour d'un éternument esquivé par un pas de côté qu'Ulrich se retrouve près de ces manèges qui fleurissaient un peu partout en période de fêtes. Il eut un bref sourire en se rappelant un ami tombé d'un cheval en bois l'an dernier avant de continuer son chemin...
Mais de s'arrêter à nouveau en manquant de percuter une jeune femme.
— Eh regarde où tu... Oh, @Sól Henriksen ?

Non sans une pointe de fierté, Moon-jeong ne ratait presque plus aucun évenement communautaire dans les environs. Que ce soit pour de petits ou de gros contrats, la coréenne prenait le pli de jour comme de nuit, appareil photo en main, pour immortaliser toutes sortes de clichés qui rendraient bien sur les pages d'un journal ou sur des pages Semmen. A l'aise dans son jean et ses trois pulls qui lui donnaient des allures de marshmallow, seul un petit beret blanc donnait une fausse touche de style à la tenue générale de quelqu'un qui passait inaperçu ; ou presque. Plusieurs fois, Moon-jeong repéra un autre photographe déjà croisé à quelques reprises, mais qu'elle ne connaissait pas. Elle hésita plusieurs fois à le contacter, avant de décider qu'une pause vin chaud était nécessaire avant toute chose.

Comme s’ils ne s’étaient jamais vraiment quitté, la surprise laisse place à une singulière sympathie dans le regard d’Ulrich. Quand Sol lui prend le bras, c’est naturellement qu’il se laisse entraîner avec un sourire appréciateur.
— C’est vrai. Je testais justement une nouvelle technique d’approches : faire semblant de te rentrer dedans pour que l’on s’insulte copieusement avant de réaliser que nous étions probablement en train de nous chercher, annonce-t-il d’un air moqueur.
Mais la retrouver lui fait plaisir : c’est un peu comme tomber par hasard sur partner in crime lors d’un braquage ; voilà au moins quelque chose qui lui ferait peut-être passer l’envie de brûler le premier mini-châlet qu’il croiserait ici.
— Comme d’habitude, j’ai envie de dire. ricana Ulrich du même air mauvais que celui que semblait prendre la belle.
Plus qu’une distraction, il n’osait pas s’avouer que les retrouvailles lui étaient bien plus agréables que ce qu’il aurait pensé.

Il faudrait être aveugle pour ne pas saisir que leur comportement trop semblable n’était pas problématique : Ulrich s’en souciait comme de l’an quarante, trop heureux d’avoir enfin quelque chose d’intéressant sur lequel souffler son énergie. Ce quelque chose avait même une saveur de quelqu’un, et pas des personnes que le sportif avait envie d’enfoncer dans la terre avec une pelle, non ; c’était une complice. Un sourcil blond se haussa à l’entente d’une compétition qui n’était même pas née et que Sol semblait vouloir remporter.
— Les plus créatives, peut-être… mais je suis persuadé de garder ma couronne en ce qui relève de l’art de blesser les autres.
Ulrich n’était pas spécialement fier, et déclarait finalement cela avec toute l’impudence tout il était capable : avec une étrange sérennité également.
Tiré par la blonde comme un enfant n’étant pas sûr du chemin à prendre, mais… eh bien, sa bouche entrouverte et son sourire creusant deux fossettes dans ses joues témoignèrent correctement de la surprise qu’il s’infligea une fois devant le guichet. Un rire nerveux plomba sa gorge, se demandant bien dans quoi il s’était embarqué avant de secouer la tête, reprenant contenance.
— Mmh, en voilà une proposition alléchante… de toute façon, je n’ai jamais aimé les calèche, ça manque de… glamour, je dirais. Ne sommes-nous pas des conquérants ? répondit-il finalement avec un air presque mauvais.

Allan capta un regard croisé, d'une personne dont elle estima qu'il serait son bon samaritain de la journée :
— Hey monsieur le chinois ! Vous savez où je peux trouver des sucres d'orge ? Il m'en faut absoluement !!
Ignorant les regards aussi curieux que fâchés quant à ce racisme primaire qui en froisserait plus d'un, Allan traversa les mètres qui la séparait de @Laurits Nilsen sans savoir à qui elle avait affaire.

La surprise étreignit la coréenne qui repéra dans la foule son amie. Avec un regard curieux et un peu méfiant de l’uniforme d’Eun-jung, c’est tout de même sans hésiter que Moon-jeong s’approche pour lui embrasser la joue.
— Hey, contente de te voir. Je sais que tu bosses, mais je comptais me prendre un vin chaud… tu veux quelque chose ? Tu as bien droit à quelques secondes règlementaires pour profiter du marché de Noël, déclara-t-elle d’un sourire coquin.